CHANT D’AUTOMNE | AUTUMN SONG |
Charles Baudelaire | trans. Stan Solomons |
I Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres; Adieu, vive clarté de nos étés trop courts! J’entends déjà tomber avec des chocs funèbres Le bois retentissant sur le pavé des cours. Tout l’hiver va rentrer dans mon être: colère, Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé, Et, comme le soleil dans son enfer polaire, Mon coeur ne sera plus qu’un bloc rouge et glacé. J’écoute en frémissant chaque bûche qui tombe; L’échafaud qu’on bâtit n’a pas d’écho plus sourd. Mon esprit est pareil à la tour qui succombe Sous les coups du bélier infatigable et lourd. Il me semble, bercé par ce choc monotone, Qu’on cloue en grande hâte un cercueil quelque part … Pour qui? – C’est hier l’été voici l’automne! Ce bruit mystérieux sonne comme un départ. II J’aime de vos longs yeux la lumière verdâtre, Douce beauté, mais tout aujourd’hui m’est amer, Et rien, ni votre amour, ni le boudoir, ni l’âtre, Ne me vaut le soleil rayonnant sur la mer. Et pourtant aimez-moi, tendre coeur! soyez mère, Même pour un ingrat, même pour un méchant; Amante ou soeur, soyez la douceur éphémère D’un glorieux automne ou d’un soleil couchant. Courte tâche! La tombe attend; elle est avide! Ah! laissez-moi, mon front posé sur vos genoux, Goûter, en regrettant l’été blanc et torride, De l’arrière-saison le rayon jaune et doux! | I Soon shall we plunge in shadows cold Farewell the living light of summer tide Already do I hear the sickening thud Of falling trees echoing in the road. Into my being will return the Winter Of shuddering hate, horror and forced labour And like the sun, at last extinct and cold My heart will be a frozen block of blood. Trembling I hear each log under the axe The echoes of the scaffold no less black My spirit like the tower that soon sags Under the tireless battle ram’s attack. I fancy, lulled by this repeated sound, Someone in haste is nailing coffins down. For whom? Summer is past, already Fall, This noise tolls like a mysterious farewell II I love your gleaming green eyes and adore Your gentle beauty, but today is bitter And nothing, neither heart, nor home, nor lover Exceeds the sunlight glistening on the sea. Yet mother me, my darling, show me tenderness. Ungrateful wretch I am, and full of sin. Lover or sister, be the passing sweetness Of glorious autumn or the setting sun. . But time is short! The eager tomb awaits Let me with my head upon your knees, Wistful for torrid summer, taste The gentle amber autumn rays. |
Trans. Copyright © Stan Solomons 2008
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